Mario Draghi et les confettis
Je n’aime pas la violence. La femme qui s’est jetée sur Mario Draghi, le Président de la BCE, ne l’était pas. Elle est prestement montée sur la table de la conférence de presse pour jeter des confettis, présumant peut-être de ce que vaudrait bientôt monnaie, à savoir pas grand-chose.
Voltaire suggérait facétieusement qu’une « monnaie papier, basée sur la seule confiance dans le gouvernement qui l’imprime, finit toujours par retourner à sa valeur intrinsèque, c’est à dire zéro ».
Cet évènement rappelle une chose, très importante : la monnaie est une des expressions régaliennes, mais pas la seule. Il y a d’abord d’économie réelle et ses forces sociales et puis la monnaie qui s’adapte. Il y avait les violentes manifestations lors de l’inauguration du bâtiment de la BCE. Il y a aujourd’hui cette femme. Et demain ?
Depuis le début de cette crise, nous adoptons le postulat que la monnaie va discipliner les forces sociales. Je crois que c’est une erreur. Chaque jour, j’ai le sentiment, de plus en plus ancré, que nous longeons une abyssale falaise. Le chemin de cette dernière, c’est celle de nos peurs et de nos espoirs. Celui qui nous conduit à avancer dans la nuit de l’histoire, souvent à reculons. Celui qui nous ne nous mène peut-être nulle part. Partis de rien pour arriver nulle part.
C’est d’ailleurs parce que j’ai eu peur de découvrir l’inanité du phénomène monétaire que je me suis dit que les monnaies ressemblaient aux dieux : elles n’existent que le temps de rassembler des adeptes. Et qu’il faut mourir assez tard avant de savoir que Dieu n’existe peut-être pas, et assez tôt avant de savoir que la monnaie ne vaut peut-être rien.
Ou plutôt, des confettis.
Bruno Colmant