Le Grexit, c’est l’engloutissement de l’Atlantide monétaire
Un sabordage monétaire grec serait un évènement improbable, s’assimilant à un engloutissement monétaire inconnu, comme l’Atlantide. Un « Grexit » entraînerait un défaut étatique immédiat, puisqu’il est illusoire que la Grèce honore sa dette publique en euros. L’abandon de l’euro entraînerait une ruée instantanée sur les dépôts bancaires. Immédiatement, les autorités publiques fermeraient les banques avant d’imposer un contrôle des capitaux destiné à préparer le basculement vers une nouvelle monnaie, une nouvelle drachme, certainement non convertible.
Dès l’introduction de la drachme, le gouvernement grec imposerait que ses citoyens rapportent les euros retirés des comptes bancaires afin de les convertir en drachmes selon une parité dépréciée. L’euro ne pourrait donc plus avoir cours pour les transactions domestiques. Cela pousserait bien sûr de nombreux grecs à conserver leurs euros sous forme physique, selon la loi de Gresham qui instruit que la mauvaise monnaie chasse la bonne, c’est-à-dire que la monnaie forte (l’euro) est thésaurisée tandis que la monnaie dépréciée (la nouvelle drachme) est utilisée pour les transactions courantes. Cela entraînerait l’émergence d’un marché noir des devises, comme l’Argentine ou la Russie l’ont expérimenté. Des contrôles aux frontières seraient évidemment déployés.
Les possibilités de refinancement auprès de la BCE s’effondreraient, en même temps que l’accès de la Grèce au marché des capitaux. Les banques grecques s’effondreraient, elles qui ne sont plus déjà que des morts vivants. Sous la pression populaire, le gouvernement solliciterait la Banque Centrale grecque afin d’alimenter la masse monétaire en nouvelles drachmes qui se déprécieraient au rythme de leur impression, exactement comme l’Argentine l’expérimente actuellement. Le taux d’inflation grimperait autour de 20-30 %, tandis que le prix des importations atteindrait des niveaux prohibitifs. Il en serait de même pour les taux d’intérêt qui grimperaient au même rythme que l’inflation, ruinant une seconde fois les épargnants tout en rendant l’investissement impossible.
Politiquement, la Grèce réaliserait que son choix politique a mené à l’impensable, c’est-à-dire la ruine. C’est à ce moment qu’une expression autoritaire se manifestera. Le gouvernement Syriza sera obligé de quitter le pouvoir afin de rétablir l’ordre social. La Grèce deviendra ingouvernable.
L’armée pourrait prendre le pouvoir. Est-ce impensable ?
Aucunement. Les pays qui traversent des tempêtes monétaires s’échouent toujours dans des géométries moins démocratiques. Lénine avait compris que pour détruire un régime, il suffisait de corrompre sa monnaie.
Bruno Colmant