Les fluctuations des marchés ont reflété l’évolution de la perception qu’ont eue les investisseurs des perspectives d’inflation et de politique monétaire durant la période sous revue1 , indique la Banque des Règlements Internationaux dans son Rapport trimestriel de septembre 2022, publié aujourd’hui. Les actualités concernant l’inflation, et la manière dont les investisseurs percevaient les réponses des autorités, ont dicté l’orientation des marchés tandis que les perspectives de croissance se dégradaient à la lumière des retombées de la guerre en Ukraine et d’un nouvel affaiblissement de l’activité en Chine. De la mi-juin à la fin juillet, les marchés des actions et de la dette ont connu une reprise à la faveur d’anticipations d’un aplatissement de la trajectoire des taux directeurs après de substantiels relèvements. En août, les marchés des actifs risqués ont connu une inversion de tendance et les rendements ont augmenté face à la réponse plus énergique apportée par les autorités à une inflation accrue.
Dans les économies de marché émergentes (EME), les marchés ont évolué de façons divergentes, souvent en fonction de la réponse politique au niveau élevé d’inflation. Les monnaies des EME en proie à une inflation forte et fermement installée ont enregistré une dépréciation continue face au dollar des États-Unis. Dans certains pays d’Amérique latine qui avaient relevé leurs taux d’intérêt sans tarder, les rendements souverains ont été beaucoup plus élevés qu’en Asie, et les monnaies de ces économies ont arrêté de se déprécier face au dollar des États-Unis vers la fin de la période sous revue.
« Le dernier mouvement de ventes en date sur les marchés, qui s’est produit après la période sous revue, a confirmé que les investisseurs s’étaient montrés plutôt optimistes, au cours des trois mois passés, quant à la résolution des difficultés économiques, a déclaré Claudio Borio, Chef du Département monétaire et économique de la BRI. À présent, ils ont pris conscience que les autorités luttent contre une inflation persistante, dans un contexte de vulnérabilités financières. »
Si les prix de nombreux produits de base ont quitté les plus-hauts atteints lors de l’éclatement de la guerre en Ukraine, ceux du gaz naturel ont bondi, notamment en Europe après la forte baisse des livraisons russes. « Les tensions sur les liquidités sur le marché européen de l’électricité constituent un rappel salutaire du défi que représente la protection de l’économie réelle contre les chocs financiers », a souligné Hyun Song Shin, Conseiller économique et Chef de la recherche.
Cinq Études analysent les marchés des produits de base, les indicateurs de tension sur les marchés, les vulnérabilités des emprunteurs, le financement bancaire et les obligations souveraines durables :
- Dans Commodity markets: shocks and spillovers, (« Marchés des produits de base: chocs et effets de contagion »), Fernando Avalos et Wenqian Huang avancent qu’il serait difficile – le cas échéant – de remplacer la production de pétrole russe sur les marchés mondiaux, cela se traduisant par des cours pétroliers durablement élevés et des effets de contagion sur les cultures agricoles servant à fabriquer des biocarburants. En outre, la hausse des cours du gaz naturel alimentera encore davantage l’augmentation des prix de l’électricité, au détriment de la production industrielle.
- Dans Under pressure: market conditions and stress (« Sous pression: conditions de marché et tensions »), Iñaki Aldasoro, Peter Hördahl et Sonya Zhu présentent de nouveaux indicateurs des conditions de marché pour trois segments clés – les changes, les marchés monétaires aux États-Unis et les marchés des titres du Trésor américain – susceptibles de servir à identifier les épisodes de tensions. Les signaux de fragilité des marchés peuvent permettre d’anticiper les tensions plusieurs mois à l’avance.
- Dans Sovereigns and sustainable bonds: challenges and new options (« Obligations souveraines et durables: défis et nouvelles options »), Gong Cheng, Torsten Ehlers et Frank Packer s’intéressent au marché en plein essor des obligations « durables », sur lequel les emprunteurs souverains ont tardé à faire leur entrée mais pourraient, grâce à d’ambitieuses bonnes pratiques, inspirer les émetteurs privés. Les obligations indexées sur des critères de durabilité (sustainability-linked bonds) assorties de pénalités de nonconformité substantielles aux yeux du public pourraient aider les émetteurs souverains à progresser vers leurs objectifs de réduction des émissions de carbone.
- Dans Borrower vulnerabilities, their distribution and credit losses (« Les vulnérabilités des emprunteurs, leur distribution et les pertes de crédit »), Ryan Banerjee, Francesco Franceschi et Stéphane Riederer observent que les données détaillées sur les emprunteurs apportent un complément utile aux mesures agrégées pour prévoir les pertes de crédit des ménages et des entreprises.
- Dans Bank funding: evolution, stability and the role of foreign offices (« Financement bancaire: évolution, stabilité et rôle des entités étrangères »), John Caparusso et Bryan Hardy mettent à jour des évolutions concernant les sources de financement des systèmes bancaires locaux, à savoir le passage des financements transfrontières à des financements locaux (ce qui renforce généralement la stabilité), et des sources intragroupe à d’autres sources transfrontières moins stables. Ces évolutions procèdent de la régression continue de la globalisation bancaire.