L’intérêt négatif constitue l’abstention devant le futur
Les taux d’intérêt négatifs reflètent le contexte déflationniste : face à un manque d’inflation, reflétant le contexte récessionnaire de nos économies, la BCE impose une inflation au travers de taux d’intérêt négatifs puisqu’il s’agit d’éroder le pouvoir d’achat de la monnaie qui se réfugie dans sa propre liquidité. Inversement, on peut concevoir le taux d’intérêt négatif comme une cause de déflation. En effet, un déposant qui prête de la monnaie à un taux d’intérêt négatif paie pour la sécurité et la liquidité immédiate de cette dernière. Il place donc la préférence pour la liquidité au-dessus de toute autre décision puisqu’il renonce à un rendement supérieur sur tout autre placement en acceptant de s’appauvrir pour cette même liquidité.
Un taux de dépôt négatif est donc une abstention devant le futur. Envisagé sous un autre angle, on sait qu’un taux d’intérêt positif représente le prix de l’arbitrage entre la consommation immédiate et future : je renonce à ma consommation immédiate si je reçois un certain taux d’intérêt. Avec un taux d’intérêt négatif, je paie pour renoncer à ma consommation future. J’ai tellement peur du futur que je renonce à être récompensé pour m’y projeter. Je paie pour rester dans le présent. A nouveau, on ressent inexorablement la renonciation du futur.
Est-ce contre-intuitif ? Aucunement puisque le taux d’intérêt est le prix du temps appliqué à un capital. Un taux d’intérêt négatif fait refouler l’écoulement du temps vers le passé.
Un taux d’intérêt négatif transgresse donc la conception séminale de l’économie monétaire, puisqu’en termes conceptuels, l’intérêt est la mesure humaine du temps appliqué au capital, c’est-à-dire au travail passé (accumulé sous forme de capital). Tout se passe comme si le futur refluait vers un passé dont il dégradait le signifiant monétaire.