Gestion de l’euro : un retour au réel s’ímpose
Entre le Président de la Banque de France qui explique que la Banque Centrale Européenne (BCE) est « très mal à l’aise » avec le niveau d’inflation et son économiste en chef, le Belge Peter Praet qui s’inquiète aussi du manque d’inflation et réitère la possibilité de mesures non conventionnelles pour soutenir l’économie, on commence à comprendre que la situation est très grave. Car, dans le langage soyeux des banquiers centraux, exprimer un « mal à l’aise » revient à dire qu’on s’attend à un désagrément (et c’est un euphémisme).
Et cette perturbation, c’est le basculement dans la déflation, dont aucun livre d’économie ne possède la recette pour s’en extraire. Ce que Peter Praet veut dire, c’est qu’après avoir baissé les taux d’intérêt à leur minimum, mis en place des taux d’intérêt négatifs, constaté le violent échec de refinancement des crédits bancaires, il ne reste qu’une solution : réescompter des dettes publiques. C’était impensable. Ce devra être mis en œuvre.
C’est toute la logique de la construction de l’euro qui est désormais fissurée, car ce réescompte éventuel des dettes publiques est incompatible avec la vision allemande de la monnaie, d’autant qu’une telle opération doit être gigantesque pour être efficace, nonobstant le fait que son succès est aléatoire.
En janvier 2014, c’est-à-dire il y a 9 mois, au Sommet de Davos, le Président de la BCE, Mario Draghi, disait « ne pas voir de déflation ». Il disait même que « l’amélioration des marchés financiers et la politique monétaire très accommodante en vigueur depuis la fin 2011 (…) se transmettent enfin à l’économie réelle ». Je crois qu’un retour au réel s’impose.
Bruno Colmant