Les fantasmes de l’hyper-inflation allemande
Les crises financières sont souvent utilisées pour alimenter des mythes et convoyer un message politique qui alimente sa propre dynamique. C’est ainsi que l’hyperinflation de 1923, conséquence tragique de la myopie du Traité de Versailles de 1919, continue à être instrumentalisée pour expliquer la peur de l’inflation allemande. Ce mythe est entretenu dans une logique protestante de l’ordolibéralisme allemand qui consiste à aligner l’économie sur une amélioration permanente des exigences de productivité malgré une devise qui se réévalue. Et pourtant, le vrai drame allemand est le délire hitlérien. Et si celui-ci trouve peut-être quelques origines dans l’hyperinflation de Weimar (après tout, Mein Kampf a été écrit en 1924 et 1925), c’est l’hyper-déflation du chancelier Brüning qui a probablement déclenché l’arrivée d’Hitler au pouvoir.
Le mythe de l’hyperinflation est donc utilisé pour agrémenter une logique politique plutôt que comme un risque politique contemporain. Et d’ailleurs, c’est bien avec la déflation que la zone euro, sous contrôle politique allemand, flirte. L’histoire se répète.
Et on retrouve l’opposition entre, d’une part, le pragmatisme anglo-saxon qui combat ses crises avec une monnaie faible et un déficit budgétaire et, d’autre part, le dogmatisme rhénan qui s’exerce à discipliner l’économie par une monnaie désinflatée et des surplus budgétaires.
Et on voit où cela nous a mené…
Bruno Colmant