Bruno Colmant

Bruno Colmant

Professeur d'économie à l'université. Membre de l'Académie royale de Belgique. Stratège. Écrivain. Conférencier.

Quand l’austérité budgétaire est une erreur…

16 février 2015

L’austérité budgétaire est une invention du 20ème siècle, consubstantielle à l’ampleur croissante du rôle de l’Etat. Qui dit austérité dit excès d’endettement. L’austérité est donc une réponse à une erreur économique, qui consiste à ne pas tirer profit des périodes de croissance pour réduire le déficit et l’endettement publics. Bien sûr, on argumentera que la contraction des dépenses publiques est politiquement incompréhensible lorsque la conjoncture est favorable et économiquement inappropriée lorsque la conjoncture est défavorable.

La question est là : est-ce que l’austérité est une bonne réponse en période de contraction conjoncturelle ? Ma conviction est qu’elle ne l’est pas et que c’est une grave erreur de politique économique de l’appliquer à une économie en désarroi. Au reste, les exemples d’échec de politique d’austérité budgétaire en période de crise ne manquent pas. Après le krach de 1929 et sa contamination à l’économie productive, tous les programmes d’austérité échouèrent, à commencer par celui de l’Allemagne, mis en œuvre sous le chancelier Brüning, prédécesseur d’Hitler. Mais la France de Laval et la Belgique de Van Zeeland connurent les mêmes échecs cuisants.

Le Japon commit incidemment les mêmes égarements en 1927 au travers d’une austérité budgétaire liée au retour à l’étalon-or qui contribua à alimenter la frustration belliqueuse nipponne. Deux ans plus tôt, Churchill avait commis la même erreur fatale en reliant la livre sterling à l’or dans un rapport qui réévalua la devise anglaise jusqu’à voir les exportations anglaises s’effondrer.

Dans les années quatre-vingt, Margareth Thatcher commit la même erreur d’austérité qui conduisit à un chômage massif. Mais d’autres exemples viennent à l’esprit ; l’Amérique centrale et la Roumanie des années quatre-vingt, la crise asiatique des années nonante, etc.

Mais les hommes oublient tout. Ils inscrivent les choix de politique économique dans des rapports de force qui furent exacerbés dans le cadre de la zone euro, monnaie qui a enlevé toute flexibilité budgétaire et monétaire domestique. Dans le cas particulier de l’euro, la Commission aligna sa politique sur l’austérité avec les conséquences épouvantables que nous constatons dans les pays du Sud. La Commission Juncker est désormais forcée d’infléchir cette politique sordide, mais dans le cadre d’un Pacte de Stabilité et de Croissance qui a entrainé la zone euro dans un siphon déflationniste et récessionnaire.

Bruno Colmant

 

 

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