Repérer des opportunités dans la dette en difficulté et décotée tout au long du cycle

25 novembre 2021
Banque de connaissances

Galia Velimukhametova

Alors que les taux de défaut sur les dettes sont exceptionnellement bas des deux côtés de l’Atlantique, on pourrait pardonner les investisseurs de penser que le marché du crédit en difficulté est plutôt atone. Il existe néanmoins des stratégies qui peuvent repérer et exploiter des opportunités même dans ce contexte, tout en bénéficiant d’une position de qualité lorsque les marchés seront de nouveau sous pression. Il faut pour cela faire preuve de souplesse tactique, adopter une approche active et avoir la capacité de prendre des positions, à la fois longues et courtes, dans l’ensemble de la structure du capital des entreprises.

Les taux de défaut sur le crédit à haut rendement se sont effondrés à environ 2% aux États-Unis et 1%  en Europe, non loin des planchers observés au cours de la décennie écoulée, malgré un léger pic enregistré au lendemain de la pandémie.

Les taux de défaut sur le crédit à haut rendement se sont effondrés à environ 2% aux États-Unis et à 1% en Europe, non loin des planchers observés au cours de la décennie écoulée.

Cela dit, sous la surface, des turbulences agitent les courants profonds. Le nombre de sociétés zombies – celles dont les bénéfices ne peuvent couvrir le coût annuel du service de la dette – reste élevé. Par ailleurs, la part de dette émise avec peu ou pas de protection contractuelle pour les prêteurs représente environ 90% du marché européen. Le ratio de l’endettement net sur le bénéfice a augmenté pour les sociétés notées B- et CCC, ce qui est plutôt préoccupant compte tenu du niveau particulièrement ajusté des bénéfices eux-mêmes.

Cette fragilité est évidente sur le marché du haut rendement. Les taux de défaut sont peut-être bas, mais de plus en plus de sociétés sont sous pression financière, c’est-à-dire que les écarts de rendement de leurs obligations sont supérieurs à 300 points de base, ce qui correspond approximativement à la moyenne à long terme de l’indice européen, mais ils restent en deçà de ce qui est considéré comme des dettes en difficulté, à 1 000 points. Parallèlement, la part de sociétés zombies par rapport à celles dont les bénéfices leur permettent de faire face à leurs dettes a augmenté dans toutes les régions.

On note déjà de profondes disparités entre les secteurs industriels et les prévisions de taux de défaut des entreprises varient considérablement entre les services aux collectivités, où les défauts sont tout sauf absents, d’un côté, et les hôtels et les sociétés de médias de l’autre.

Cette situation crée un terrain fertile pour des investisseurs comme nous, qui peuvent prendre des positions courtes et longues. Par exemple, nous pouvons vendre à découvert des sociétés en difficulté en prévision d’une décote ou d’un défaut de paiement. Après cela, nous pouvons les racheter pour leurs perspectives de restructuration. En outre, comme nos participations couvrent toute la structure du capital des sociétés, nous pouvons arbitrer entre les actions et la dette ainsi que différentes tranches d’emprunts.

À ce stade du cycle du crédit, nous sommes de plus en plus prudents. La volatilité des marchés augmente. Les banques centrales sont prêtes à vidanger une partie des immenses réservoirs de liquidité qu’elles ont créés depuis la pandémie. Les transferts budgétaires en direction des ménages et des entreprises voient leur taille se réduire. Les pressions inflationnistes s’intensifient, en partie en raison des perturbations de la chaîne d’approvisionnement et d’une explosion des prix des matières premières. Les gouvernements prennent également les entreprises pour cible, non seulement en Chine, avec un durcissement réglementaire dans certains secteurs comme l’immobilier, mais aussi ailleurs. Pendant ce temps, la Covid a accéléré les changements structurels dans l’économie, en précipitant l’adoption du e-commerce, imposant l’efficience technologique et favorisant la démondialisation.

Selon nous, en raison de ces facteurs, ce cycle sera marqué par davantage de dettes en difficulté que par le passé. Nous sommes également prudents au sujet de la baisse des taux de recouvrement1  de ces dernières années – à l’avenir, il faudra évaluer les entreprises en difficulté avec encore plus de soin. Il est également fondamental de rechercher des actifs liquides – la pandémie a clairement montré les dommages que pouvaient causer des positions d’investissement illiquides.

Grâce à un travail minutieux sur le crédit fondamental, à une gestion précise des risques et des liquidités et à une gestion active de l’ensemble de la structure du capital, assortie d’une capacité à prendre des positions aussi bien longues que courtes, nous pouvons identifier des opportunités sur le marché parmi les dettes en difficulté et décotées tout au long du cycle – à la fois aujourd’hui, alors que la situation semble tranquille, et au cours des trimestres à venir quand elle sera moins sage.

1 Le taux de recouvrement indique la mesure dans laquelle le principal et les intérêts cumulés d’une obligation sont recouvrables en cas de défaut. Il est exprimé en pourcentage de la valeur nominale de l’obligation.

Galia Velimukhametova, Senior Investment Manager.



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