Une baignoire de mousse avec un gramme de savon ?
Depuis des mois, la presse anglo-saxonne s’émeut de la possible décision de la Federal Reserve d’augmenter les taux d’intérêt à court terme…d’un quart de pourcent. Cette éventuelle augmentation signifierait que les Etats-Unis considèrent que leur économie est en voie de normalisation. Il s’en suivrait une légère appréciation du dollar et un reflux des capitaux actuellement investis dans les marchés émergents au profit des Etats-Unis. Mais ne fait-on pas une baignoire de mousse avec un gramme de savon ?
Selon le site Zerohedge, au cours des 110 derniers mois, les banques centrales des pays développés ont baissé leurs taux directeurs 697 fois, ramené leur taux d’intérêt à zéro et acheté des actifs pour 15.000 milliards de dollars, soit près de 20 % du PIB mondial. Face au gigantisme de cette évolution, je crois que l’éventuelle augmentation des taux d’intérêt américains n’est pas le problème. En effet, toute la morphologie de l’économie monétaire est modifiée.
Les banques centrales avaient un rôle résiduel dans la gestion de l’économie. Aujourd’hui, elles fournissent la liquidité et sont chargées de monétiser des dettes privées et publiques, c’est-à-dire de les transformer en monnaie créée ex-nihilo.
Au mieux, comme aux Etats-Unis, la croissance permettra aux circuits financiers de fonctionner normalement, et les rachats d’actifs par la Federal Reserve se dilueront dans une croissance retrouvée. Au pire, comme en Europe, la croissance de l’endettement public dans un contexte déflationniste conduira la BCE à financer l’Etat-providence.
Dans les deux cas, les banques centrales contribuent à annihiler l’endettement en rendant la monnaie plus abondante, et donc moins chère et dévoyée. Il en résulte une inconnue : quand l’inflation va-t-elle à nouveau se manifester ? C’est à ce moment que la fin de la crise sera signalée. Le reste n’est que distractions.
Bruno Colmant